Le respect de la diversité linguistique est un des fondements démocratique et culturel de l'Union européenne, reconnu par la Charte européenne des Droits fondamentaux dans son article 22.
Le gouvernement de Silvio Berlusconi vient de porter gravement atteinte à cette solidarité linguistique européenne. Par la voix de son ministre des finances Giulio Tremonti, le gouvernement italien vient de décider la suppression de 87.000 postes d'enseignants en 3 ans. En conséquence, la ministre de l'Éducation Maria Stella Gelmini a décidé de rendre quasi impossible l'apprentissage d'une deuxième langue. Jusqu'ici, les jeunes Italiens faisaient 3 heures d'anglais hebdomadaire et 2 heures d'une autre langue. Désormais, ils ne feront plus que ... 5 heures d'anglais ! [source : Jean-Louis Bourlanges, L'Esprit public du 18 janvier 09]
De nombreux enseignants italiens ont réagi aussitôt en fustigeant ce « tout anglais pédagogique». À leur suite, les diplomates réalisent le danger que cette option pédagogique fait peser sur la diversité linguistique en Italie et au delà, dans toute l'Union européenne. Car sur ce schéma, l'anglais ne risque-t-il pas de devenir la seule langue 'étrangère' des jeunes Européens ?
Je cite une lettre d'Anna Maria Campogrande, président d'Athena, association de promotion des langues officielles* de l'Union européenne :
(...) Sous l’influence des politiques communautaires et avec la participation active de la Direction Générale Education et Culture, l’enseignement des grandes langues de culture et langues officielles des Etats Membres est en voie de disparition dans la plupart des Pays de l’Europe et, en particulier, en Italie dont l’ancien Ministre de l’Instruction Publique, Letizia Moratti, avait fait le choix du tout-anglais, pour tous, dès l’école primaire.
La question linguistique européenne porteuse d’un impact éminemment démocratique, dont la prise en compte constitue l’une des clefs de la réussite ou de l’échec du projet européen, ne peut pas être laissée aux aléas du marché ou, encore moins, à ceux de la propagande de la langue unique qui vise la colonisation linguistique et culturelle de l’Europe et, à terme, son anéantissement.
Le Médiateur européen, qui s’est penché sur un aspect particulier de cette vaste problématique, celui du site Internet de la Présidence du Conseil, vient d’ adresser un rapport spécial au Parlement Européen lui demandant de lui apporter son soutien, ce qui rappelle au Parlement Européen qu’il ne peut plus, encore longtemps, ignorer cette question cruciale.
Dans ce contexte, nous vous demandons de nous aider d’urgence à sauver l’enseignement de l’allemand dans l’Instruction Publique italienne et dans celle de l’Europe communautaire dans son ensemble.
D’avance, nous vous remercions de tout ce que vous entreprendrez pour rendre à l’Europe, et la lui conserver, sa diversité linguistique et culturelle qui représente sa vraie richesse et, au plus profond, son identité.
Voir aussi la lettre des associations italiennes de langue aux ambassadeurs (version it et traduction automatique en fr)
Mise à jour du 25 janvier : voir le document "De nombreuses langues, une seule famille — les langues dans l'Union européenne" où l'on apprend entre autres choses très intéressantes que le Conseil de l'Europe organise chaque année, le 26 septembre, la Journée européenne des langues et où l'on apprend aussi que le mot d'ordre des institutions européennes en matière d'apprentissage des langues est « Langue maternelle + 2 », apprentissage préconisé le plus tôt possible et se poursuivant jusqu'à l'âge adulte... En Italie comme dans la plupart des pays européens, du chemin reste à faire !
Intermède musical : un Top 50 européen !
* pour mémoire, il existe actuellement 21 langues officielles au sein de l'Union européenne : allemand, anglais, danois, espagnol, finnois, français, grec, irlandais, italien, néerlandaise, portugais et suédois auxquelles se sont ajoutés le 1er mai 2004 le tchèque, l'estonien, le hongrois, le lituanien, le letton, le polonais, le slovène, le slovaque et le maltais.
Il est évident que les Italiens ont toujours eu un penchant pour les "Américains" et donc pour leur langue :-)
RépondreSupprimerhttp://fr.youtube.com/watch?v=BqlJwMFtMCs
Plus sérieusement, si on prend le décret comme il est énoncé les parents auront le choix entre ce qui existe actuellement à savoir 3 heures d'anglais et 2 heures d'une autre langue communautaire ou "l'anglais renforcé" de 5 heures. http://quotidianonet.ilsole24ore.com/2009/01/15/144467-giudizi_addio_tornano_voti_pagella.shtml
A priori, les parents privilégieront en majorité en effet, non pas de préserver la diversité linguistique de l'Europe mais avant tout de donner à leurs enfants l'éducation, les outils qui leur semblent les plus utiles et pertinents pour les armer face à un avenir qui leur semble difficile professionnellement.
Donc si ceux-ci estiment que l'anglais "servira" mieux leurs enfants, il est possible en effet que tes craintes soient fondées. Mais, si je puis me permettre, les parents italiens ne sont pas différents des autres parents européens.
http://fr.youtube.com/watch?v=BqlJwMFtMCs
RépondreSupprimerhttp://quotidianonet.ilsole24ore.com/2009/01/15/144467-giudizi_addio_tornano_voti_pagella.shtml
Le tout fait malheureusement parti d'un mouvement de fond recherchant l'efficacité culturelle par opposition à une culture trop « dispersée ». Terrible! Ça va dans le sens contraire de ce qui fait notre histoire et de la richesse intellectuelle que l'homme a développé, mais la globalisation généralisée Anglo-saxonne impose cela. Une planète un langage! Une planète un langage! Le notre...
RépondreSupprimerLa différence entre ce qui est acceptable ou pas vient de la méthode. Si c'est un libre choix des parents de ne choisir que le seul Anglais pour leurs enfants, on peut dire que c'est triste, mais ainsi va le monde. Si cela est imposé de façon unilatérale par le gouvernement, ce n'est pas autre chose que de la dictature culturelle.
Mise à jour du 25 janvier :
RépondreSupprimerVoir le document "De nombreuses langues, une seule famille — les langues dans l'Union européenne" où l'on apprend entre autres choses très intéressantes que le Conseil de l'Europe organise chaque année, le 26 septembre, la Journée européenne des langues et où l'on apprend aussi que le mot d'ordre des institutions européennes en matière d'apprentissage des langues est « Langue maternelle + 2 », apprentissage préconisé le plus tôt possible et se poursuivant jusqu'à l'âge adulte... En Italie comme dans la plupart des pays européens, du chemin reste à faire !
@ 1cognita :
RépondreSupprimerEn effet, selon le texte du décret, l'apprentissage d'une 2ème langue communautaire n'est plus obligatoire, ce qui constitue bien une régression pour la diversité linguistique, régression par rapport à la situation antérieure et par rapport à la plupart des autres pays européens.
D'ailleurs, on pourrait même se demander pourquoi l'apprentissage de l'anglais est obligatoire... Car si l'on veut s'en remettre à la responsabilité des parents 'ce que j'accepte volontiers) alors au moins faudrait-il leur laisser le choix ! Aujourd'hui, l'anglais est parlé quotidiennement par moins de 10% de la population mondiale... 9% si mes infos sont exactes. Quid du chinois, de l'espagnol, du portugais, ou des langues rares qui sont parfois, aussi d'excellents atouts en matière d'insertion professionnelle.
Rien ne justifie à mes yeux cet impérialisme linguistique (et culturel) en faveur de ce qu'on appelle un peu abusivement 'l'anglais' qui est un fait une sorte de 'globish' utilitariste qui n'a pas grand chose à voir, finalement, avec la langue de Shakespeare ;-)
@ Philippe :
Comme dit ci-dessus, je ne suis pas aussi persuadé que toi que l'anglais exclusif constitue à terme, le meilleur choix pour l'éducation des enfants. Moins de 10% de la population mondiale parle anglais. Quant à rendre l'apprentissage de l'anglais obligatoire, alors oui on est d'accord, appelons un chat un chat : il s'agit ni plus ni moins d'une soumission consentante à une forme larvée d'impérialisme culturel ! C'est le rôle de l'Europe que de préserver cette diversité linguistique et cette richesse, ce trésor culturel.