dimanche 30 janvier 2011

Conseil d'Alsace — Oui à la fusion, non à la confusion !

Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Le projet de fusion des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la région Alsace a connu cette semaine des annonces contradictoires et des développements particulièrement alambiqués.

Pourtant, la réforme des collectivités territoriales adoptée le 17 novembre prévoit assez clairement les modalités de fusion entre départements et région. En deux temps : d'abord l'accord des collectivités concernées, puis un référendum recueillant la majorité (25% des inscrits) dans chaque département :

Chapitre IV (article 29 de la loi)

Fusion d’une région et des départements qui la composent

« Art. L. 4124-1. – I. – Une région et les départements qui la composent peuvent, par délibérations concordantes de leurs assemblées délibérantes, demander à fusionner en une unique collectivité territoriale exerçant leurs compétences respectives. (...)

« II. – Le Gouvernement ne peut donner suite à la demande que si ce projet de fusion recueille, dans chacun des départements concernés, l’accord de la majorité absolue des suffrages exprimés, correspondant à un nombre de voix au moins égal au quart des électeurs inscrits.

« Cette consultation des électeurs est organisée selon les modalités définies à l’article L.O. 1112-3, au second alinéa de l’article L.O. 1112-4, aux articles L.O. 1112-5 et L.O. 1112-6, au second alinéa de l’article L.O. 1112-7 et aux articles L.O. 1112-8 à L.O. 1112-14. Un arrêté du ministre chargé des collectivités territoriales fixe la date du scrutin, qui ne peut intervenir moins de deux mois après la transmission de la dernière délibération prévue au I du présent article.

« III. – La fusion de la région et des départements qui la composent en une unique collectivité territoriale est décidée par la loi, qui détermine son organisation et les conditions de son administration. »


Dès dimanche, le journal L'Alsace annonçait à la Une un accord historique vers le Conseil d'Alsace. On attendait l'annonce de la consultation des assemblées et la date du référendum... Mais les pages intérieures étaient beaucoup moins claires : les présidents prônent l'union, pas la fusion. Il s'agirait plutôt d'expérimenter une inter-collectivité (sic) mais sans remettre en cause le principe de libre administration des collectivités, ni la gestion de leurs dossiers spécifiques.

En clair, ajouter une couche supplémentaire à l'empilement territorial existant pour permettre aux 3 collectivités de se réunir les même jours et aux même dates, en attendant les conseillers territoriaux qui seront élus en 2014.

« On pourra siéger ensemble, mais la libre administration de nos collectivités restera entière », se félicitait même Charles Buttner, président du CG68, opposé à la fusion.

Cerise sur le gâteau de l'inter-collectivité annoncée, la gouvernance sera assurée de manière collégiale par les trois présidents. Et la présidence déléguée sera exercée à tour de rôle tous les quatre mois par l'un d'entre eux. Oh ! la jolie usine à gaz en perspective. En septembre 2008 déjà, les conseils généraux du Bas-Rhin et du Haut-Rhin s'étaient réunis ensemble à Sélestat. Bravo pour l'exploit mais quel est le résultat concret de ces réunions communes si la libre administration de chaque collectivité reste entière ?

L'accord historique stipule également qu'un groupe projet (re-sic) sera nommé dès le lendemain des élections cantonales, pour travailler sur les possibilités de transferts de nouvelles compétences de l'État vers le Congrès d'Alsace... Mais qui peut croire que l'État transfèrera la moindre compétence vers une "inter-collectivité" aussi brouillonne ? Comprenne qui pourra.

Enfin, on apprenait samedi dans l'émission La Voie est Libre qu'un référendum allait être organisé en Alsace dès cet automne pour valider, je suppose, les choix de l'énigmatique "groupe projet" dont on n'a pas encore très bien compris quelle était la mission...

Il y aura donc deux référendum en Alsace. Un premier dès cet automne et un second en 2014 pour décider de la fusion réelle... À moins que le taux de participation aux élections cantonales de mars prochain ne décourage les protagonistes entre temps... Wait & see !

Pourquoi tant de fébrilité et de précipitation sur un sujet aussi sérieux ? Un ministre de plein exercice (et à plein temps) pourrait sans doute mieux garder le cap d'une réforme territoriale nécessaire (2014) sans être à la fois juge et partie dans ce projet, comme ministre des Collectivité territoriales et comme Président (à mi-temps) du Conseil régional d'Alsace... déjà en campagne pour les élections cantonales [FB], d'ailleurs. On peut même se demander si cette vaine agitation autour d'une expérimentation aussi floue, n'aurait pas simplement quelques visées électoralistes...

Sur le fond, il reste aussi l'épineuse question du mode de scrutin sur laquelle je reviendrai. Pourquoi le groupe projet ne mettrait-il pas cette question sur la table ? En s'inpirant du mode de scrutin mixte des Länders allemands, par exemple ?

Oui à la fusion, non à la confusion !

La Voie est Libre du 29 janvier 2011
(cliquer sur Start pour démarrer)
avec Philippe RICHERT, Charles BUTTNER et Guy-Dominique KENEL

mardi 25 janvier 2011

Mais où est donc passée la taxe poids lourds pour l'Alsace ?

par Yann Wehrling, Michel Lorentz et Frédéric Le Jehan

Elle était prévue fin 2010 ou début 2011. Elle devait tester, en Alsace, avant généralisation à la France entière, une éco-redevance pour les poids lourds de plus de 12 tonnes. Elle devait s'appliquer dans notre région à 190 km d'autoroutes ou de routes nationales et à 54 km de routes départementales.

Mais il y a un an, le gouvernement avait déjà en partie abandonné le principe d'une expérimentation distincte ; pour son application la redevance alsacienne sera rattachée au Partenariat Public Privé (PPP) prévu pour la création d'une éco-redevance nationale. En clair, l'expérimentation dépendra techniquement, juridiquement, comme dans son équilibre financier, des choix d'un opérateur dont la priorité sera la mission nationale.

Dépourvue d'autonomie dans sa mise en œuvre, cette anticipation régionale, se retrouve dépendante des «difficultés techniques» rencontrées par le projet de PPP national, qui servent de prétexte au report de l'ensemble.

Cette expérimentation-croupion limitée à une année (voire moins) avant la création d'une redevance nationale était déjà un premier recul car le débat sur la question, lancée par l'installation côté allemand du système de péage dit LKW Maut, a surtout révélé les hésitations, tergiversations et atermoiements des responsables alsaciens.

Le discours, d'abord ferme, s'est érodé au fur et à mesure que les transporteurs locaux faisaient valoir leurs intérêts. Le droit européen ne permet pas en effet de taxer exclusivement les poids lourds non alsaciens, ce qui se comprend aisément dans un espace de libre circulation des marchandises et de traitement équitable des entreprises.

Au 1er janvier 2005, le nouveau système de péage allemand a commencé à s'appliquer : il s'agit d'une redevance qui se calcule en fonction du nombre de kilomètres parcourus sur le réseau autoroutier allemand. Elle génère, fort naturellement, un effet report du trafic de l'autre côté du Rhin, encore accentué par l'absence de péage même classique sur l'axe nord-sud alsacien. Et cela fait déjà six ans qu'aucune réponse concrète n'a été mise en œuvre entre Vosges et Rhin.

Les expérimentations locales vues d'un mauvais œil.

Au fond, sur ce sujet inscrit dans l'esprit du Grenelle de l'environnement, comme d'ailleurs sur celui de la taxe carbone, le recul est patent.

Aux bonnes et louables intentions gouvernementales des débuts a succédé le temps des frictions et des doutes, préalable à celui de l'enlisement. D'une part, l'esprit jacobin qui imprègne une bonne part de nos grandes administrations nationales a toujours vu d'un mauvais œil les expérimentations locales, a fortiori lorsqu'elles concernent une région de « la France de l'extérieur». D'autre part, les entreprises de la filière concernée se battent pour protéger leurs intérêts, ce qui est bien naturel et à quoi il faut répondre par des mesures sectorielles de prise en compte de leurs difficultés économiques plutôt que de renoncer à une mesure d'intérêt général.

Au final, les autres usagers des autoroutes et routes d'Alsace ou les Alsaciens eux-mêmes payent le prix de ce recul à travers un encombrement et une pollution accrus sur ces axes. Une fois de plus, le volontarisme politique semble faire défaut pour défendre les intérêts de notre région.

Yann Wehrling, porte-parole du Mouvement Démocrate et membre du Shadow cabinet chargé de l'écologie et du développement durable.
Michel Lorentz, maire de Roeschwoog (MoDem)
Frédéric Le Jehan, ancien conseiller municipal de Strasbourg (MoDem)

Tribune parue dans les Dernières Nouvelles d'Alsace,
mardi le 25 Janvier 2011

vendredi 21 janvier 2011

Comment parler des hebdos que l'on n'a pas encore lus ? *

Archi-simple. Entre les lignes, le vendredi soir sur LCP, en direct à 19h30 ou sur le Net quelques heures plus tard. Sous la baguette de Christophe RUAULTS, regards croisés de :

Au programme cette semaine :
Tunisie / les politiques n'auraient-ils pas le dos un peu large ?
Marine Le Pen / attention au RE-positionnement politique...
L'Hôtel de la Marine / le patrimoine national bradé aux intérêts privés.

* : Pierre BAYARD pour l'emprunt du titre