mercredi 18 mars 2009

— « Ce pape commence à poser un vrai problème (...) »

Enfin ! On le connaissait droit dans ses bottes... Alain Juppé est le premier politique à réagir clairement. C'était ce matin sur les ondes de France Culture.

Il s'est passé presque 24 heures avant qu'un homme politique réagisse aux propos consternants du pape — selon lui, le préservatif aggrave le problème du sida en Afrique.

Peut-on, sous prétexte du respect de la laïcité, continuer à lui laisser dire n'importe quoi ?

Mise à jour du lendemain :
(source AFP - Le Figaro)

Par sa déclaration de mercredi matin, Alain Juppé semble avoir ouvert la brèche. Dès le lendemain, les principaux leaders politiques lui emboitaient le pas :

Rama Yade, s'est dite «ahurie» par les propos «régressifs» tenus par le pape. «Je pense aux victimes, aux médecins, aux chercheurs, aux ONG, à tous ceux qui sont certainement blessés. Je voudrais leur dire ma solidarité et mon admiration», a-elle déclaré sur Europe 1.

Marie-George Buffet, secrétaire nationale du PCF a ainsi qualifié ces déclarations d' «irresponsables» et de «criminelles»

Daniel Cohn-Bendit, député européen des Verts, a pour sa part estimé que les propos du pape constituaient «presque un meurtre prémédité». «Il y en a assez maintenant de ce pape», a-t-il ainsi lancé.

Jean-Patrick Gille secrétaire national à la Famille au Parti socialiste : «Des centaines de milliers d'hommes et de femmes risquent d'être contaminés à cause de ces propos irresponsables»

Ségolène Royal s'est déclarée «choquée» par les propos de Benoit XVI. «Il y a 33 millions de personnes touchées par le Sida dans le monde» a-t-elle rappelé. «L'objectif d'un chef religieux est de défendre le principe de vie, certainement pas d'engager les êtres humains vers la mort ». «J'observe avec satisfaction que les catholiques élèvent la voix contre les propos du Pape» a-t-elle rajouté.

François Bayrou, président du Mouvement Démocrate, qui se dit catholique pratiquant, a jugé lui aussi «irrecevables» les propos du pape, soulignant que «la première responsabilité», en particulier des chrétiens, «c'est la défense de la vie». «Je pense qu'avec les déclarations et les décisions multipliées du Saint Siège, il y a beaucoup de chrétiens qui sont en situation déstabilisée».

Seule Christine Boutin (UMP), catholique pratiquante connue pour ses prises de positions assez conservatrices -notamment à l'encontre de l'avortement-, a de son côté estimé qu'il n'est «pas drôle de mettre le préservatif quand on fait l'amour». La ministre du Logement a ainsi expliqué qu'en matière de préservatif, «chacun fait comme il peut et comme il veut», «n'attendez pas du pape qu'il dise qu'il faut mettre le préservatif», a-t-elle expliqué au micro d'RTL.

8 commentaires:

  1. Pourquoi "sous prétexte du respect de la laïcité" ?

    Ben sinon, sur le sujet ça serait bien que le Patron s'exprime, non?

    Vu que le Mouvement Démocrate a historiquement le terme "chrétiens" adjoint à démocrates, autant éclaircir nos positions non? A savoir une séparation claire et nette entre la vision du Vatican et la notre, laïque et progressiste!

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  2. Mais de quel droit oses-tu, toi, Pierre, petit pécheur, mettre en doute l’Infaillibilité papale, sacrée par Dieu… Mais, mais, tu cherches à te faire excommunier toi aussi, comme la petite fille de 9 ans, violée par son beau-père, qui a du avorter pour sauver sa peau… Saches que le pape est infaillible par Dieu, ce qu’il dit est loi, quoi qu’il dise…
    Alors tiens toi bien, fait gaffe à la foudre papale…

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  3. @ 1cognita :

    Je faisais l'hypothèse que l'absence de réaction des politiques aux déclarations ahurissantes du pape découlait du principe de laïcité : séparation des pouvoirs temporels et spirituels.

    À part Juppé ce matin, je n'ai pas entendu grand monde s'indigner des imbécilités prononcées par le pape. Tous les politiques sans exception feraient bien de «l'ouvrir» sur le sujet car les provocations du pontife commencent à bien faire.

    Du point de vue historique, le MoDem ne fait plus référence à la démocratie chrétienne. Il en est l'héritier tout simplement, à travers une composante de l'ex-UDF, les démocrates-chrétiens qui avaient déjà 'laïcisé' leur nom par Centre des démocrates sociaux (CDS). Lesdits démocrates sociaux étant eux-même issus de l'ex-MRP fondé après-guerre et auquel appartenait Robert Schuman. On peut remonter même au Sillon fondé par Marc Sangnier en 1899 et qui fut dissout par le pape Pie X en 1910... Et le Sillon déjà était un mouvement d'émancipation des chrétien par rapport à l'autorité du pape :-)

    @ Philippe :

    J'ai bien aimé le titre d'une autre brebis égarée ce matin : « Sa Sainteté est-elle saine d'esprit ? »

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  4. Sida : les propos du pape créent l'indignation en France
    Flore Galaud (lefigaro.fr) avec AFP

    19/03/2009 | Mise à jour : 10:15

    Les déclarations de Benoit XVI sur l'utilisation du préservatif qui «aggraverait» le problème du sida ont déclenché un véritable tollé en France. Jean-Luc Romero évoque «un message de mort adressé aux Africains».

    Selon Benoit XVI, non seulement le préservatif ne peut «pas régler le problème du sida », mais «au contraire, (son) utilisation aggrave le problème ». Si ses déclarations sont passées quasiment inaperçues en Afrique, où il se trouve actuellement, c'est loin d'être le cas en France. En effet depuis mercredi matin, ses propos suscitent la controverse. A commencer par le Quai d'Orsay, qui a exprimé sa «très vive inquiétude» face à ces déclarations, qui mettent en danger « les politiques de santé publique et les impératifs de protection de la vie humaine». La France estime «qu'avec l'information, l'éducation et le dépistage, le préservatif est un élément fondamental des actions de prévention de la transmission du virus du sida», a ainsi déclaré le ministère des Affaires étrangères.

    «Il y en a assez maintenant de ce pape»

    Certaines personnalités politiques sont également montées au créneau, comme Alain Juppé (UMP), qui a déclaré mercredi matin que «ce pape» commençait «à poser un vrai problème», tout en se réaffirmant catholique et «attaché aux valeurs chrétiennes». Après les affaires de l'évêque intégriste ayant tenu des propos négationnistes et de l'excommunication d'une mère ayant fait avorter sa fillette violée au Brésil, le pape donne l'impression de vivre «dans une situation d'autisme total», a-t-il ajouté.

    Christine Boutin (UMP), catholique pratiquante connu pour ses prises de positions assez conservatrices -notamment à l'encontre de l'avortement-, a de son côté estimé qu'il n'est «pas drôle de mettre le préservatif quand on fait l'amour». La ministre du Logement a ainsi expliqué qu'en matière de préservatif, «chacun fait comme il peut et comme il veut», «n'attendez pas du pape qu'il dise qu'il faut mettre le préservatif», a-t-elle expliqué au micro d'RTL.

    La secrétaire d'Etat française chargée des droits de l'Homme, Rama Yade, s'est quant à elle dite «ahurie» par les propos «régressifs» tenus par le pape. «Je pense aux victimes, aux médecins, aux chercheurs, aux ONG, à tous ceux qui sont certainement blessés. Je voudrais leur dire ma solidarité et mon admiration», a-elle déclaré sur Europe 1.

    L'indignation est également forte à l'autre bout de l'échiquier politique. La secrétaire nationale du PCF Marie-George Buffet a ainsi qualifié ces déclarations d' «irresponsables» et de «criminelles». Daniel Cohn-Bendit, député européen des Verts, a pour sa part estimé que les propos du pape constituaient «presque un meurtre prémédité». «Il y en a assez maintenant de ce pape», a-t-il ainsi lancé. Des centaines de milliers d'hommes et de femmes risquent d'être contaminés à cause de ces propos irresponsables», a également expliqué Jean-Patrick Gille, secrétaire national à la Famille au Parti socialiste.

    Jeudi matin, Ségolène Royal s'est déclarée «choquée» par les propos de Benoit XVI. «Il y a 33 millions de personnes touchées par le Sida dans le monde» a-t-elle rappelé. «L'objectif d'un chef religieux est de défendre le principe de vie, certainement pas d'engager les êtres humains vers la mort ». «J'observe avec satisfaction que les catholiques élèvent la voix contre les propos du Pape,» a-t-elle rajouté. L'ex-candidate a par ailleurs qualifié de «déplacé» le soutien de la ministre du Logement Christine Boutin à Benoît XVI.

    Le président du Mouvement Démocrate (MoDem) François Bayrou, qui se dit catholique pratiquant, a jugé lui aussi «irrecevables» les propos du pape, soulignant que «la première responsabilité», en particulier des chrétiens, «c'est la défense de la vie». «Je pense qu'avec les déclarations et les décisions multipliées du Saint Siège, il y a beaucoup de chrétiens qui sont en situation déstabilisée».

    «Des années de travail remises en cause»

    Le Programme des Nations unies sur le sida (Onusida) a de son côté déclaré que les préservatifs étaient une composante «essentielle» de la lutte contre la maladie. «Avec plus de 7.400 infections supplémentaires chaque jour, le monde ne peut arrêter l'épidémie du sida sans mettre un terme aux nouvelles infections au VIH»,a-t-il estimé.

    Les associations, également choquées, n'ont pas tardé à réagir. Le directeur exécutif du Fonds mondial de lutte contre le sida Michel Kazatchkine a exprimé mercredi matin sa «profonde indignation» et a demandé au pape de «retirer ses propos, et clairement», les jugeant «inacceptables». «Totalement scandalisé et sidéré», le président de l'association Elus locaux contre le sida, Jean-Luc Romero, a évoqué «un message de mort adressé aux Africains». «Faudrait-il rappeler (au pape) que le seul vaccin disponible reste aujourd'hui le préservatif?», a-t-il ainsi lancé.

    Le directeur de l'Agence nationale de recherches sur le sida Jean-François Delfraissy s'est dit «catastrophé par ce type de message extrêmement contre-productif alors même que le pape arrive dans le continent africain, le continent le plus touché par l'épidémie». «L'épidémie continue de façon massive, avec 3,5 millions de nouvelles contaminations par an, essentiellement dans les pays du sud» et «quasi exclusivement par voie sexuelle» a rappelé le Pr Delfraissy.

    Pour Médecins du monde, il s'agit de «paroles gravissimes quand on voit l'impact que ce type de message peut avoir en Afrique». «Ce sont des années de travail qui sont remises en cause et surtout ce sont des millions de gens qui vont être contaminés à cause de ces déclarations». Les propos du pape sur le préservatif témoignent d'un «décalage avec la vie des gens», a estimé Sidaction. «Partout en Afrique, on travaille avec des religieux et des religieuses (...) qui savent que c'est le seul moyen de prévention».

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  5. Pierre,

    Bien que les partis démocrates se soient heureusement laïcisés il n'en reste pas moins que l'héritage que tu rappelles est présent ..

    heureusement dirais-je aussi parce que c'est d'après moi une "bonne" base qui a permis au Mouvement Démocrate d'évoluer vers d'autres repères que constituent notamment les charte des valeurs et charte éthique.

    Ceci dit, compte tenu que le Patron est clairement catholique "pratiquant", il est normal que nous sachions ce qu'il en est de son "attachement" au Vatican qu'il appelle (je me permets de pointer ce terme particulier) le "Saint Siège" .

    Le Vatican est un État avec un statut particulier certes mais politique. Le Saint Siège est la représentation du caractère spirituel de l'Église.

    Mais bon pas évident de discerner..les pouvoirs!
    Ni pour le pape, ni pour l'opinion publique.
    Ni pour les chrétiens, ni pour les laïcs.
    Ni pour les politiques, ni pour les citoyens.

    C'est pour cela, que des Chefs politico-spirituels comme le Pape ou le Dalai Lama ne peuvent ignorer la portée de leurs paroles dans tous les champs et se doivent de rester prudents dans leurs propos.

    Aussi, déjà Jean Paul II avait critiqué l'utilisation du préservatif pour lutter contre le sida, en donnant les alternatives d'"abstinence" et de "chasteté".
    Benoît XVI a prononcé le mot de "préservatif" pour la première fois semble-t-il sans donner d'autres consignes sur la "pratique" de la "Chose" si ce n'est de dire qu'il (le préservatif) n'est pas une solution au problème, voire un facteur aggravant.

    C'est sur que les catholiques "pratiquants" sont, comme dirait le Patron, "déstabilisés" :-)

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  6. Pour ma part, je me fiche éperdument de l'attachement de Bayrou au Vatican ;-) En vertu du principe de laïcité, précisément.

    Ce qu'il y a de profondément choquant dans la déclaration de B16, c'est son côté prosélyte. Libre à lui de penser qu'il existe de meilleures parades au sida que la capote.

    Libre même à tous les "catholiques pratiquants" de penser comme lui c'est-à-dire : no sex avant ou en dehors du mariage. Tous les "catholiques pratiquants" ont bien le droit de penser ça, pas de problème :-)

    Mais ériger ce dogme pour "pratiquants" en une règle de comportement universelle en abusant de son aura médiatique sur les plus faibles, voila ce qu'il y a d'inacceptable dans cette déclaration.

    Oui, comme disait Juppé, ce pape commence à poser un vrai problème. S'il réservait ses recommandations aux encycliques et au prechi-precha à l'intérieur des églises et des basiliques, il n'y aurait pas de problème. Mais qu'il use de son autorité morale pour déverser ses discours ahurissant dans l'espace public et dans les médias, voilà précisément ce qui entache le principe de laïcité. Et tant que les hommes politiques laisseront faire sans broncher, il continuera !

    Mais là pour la coups, il va encore plus loin en affirmant que les capotes aggravent le problème du sida, ce qui est contredit par tous les experts sans exception. Mais qu'attend-on pour faire taire cet énergumène en chasuble ? Il serait temps de saisir les moyens adéquates, judiciaires s'il le faut, pour le mettre en face de ses responsabilités civiles ! Car tout pape qu'il est, il n'en est pas moins un homme responsable et donc, justiciable.

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  7. Voici la version française des paroles du souverain pontife, telle qu'elle est rapportée sur le site officiel du Vatican:

    «Nous donnons à présent à nouveau la parole à une voix française: c'est notre collègue Philippe Visseyrias de France 2.

    – Votre Sainteté, parmi les nombreux maux qui affligent l'Afrique, il y a également en particulier celui de la diffusion du sida. La position de l'Eglise catholique sur la façon de lutter contre celui-ci est souvent considérée comme n'étant pas réaliste et efficace. Affronterez-vous ce thème au cours du voyage?

    –Je dirais le contraire: je pense que la réalité la plus efficace, la plus présente sur le front de la lutte conte le sida est précisément l'Eglise catholique, avec ses mouvements, avec ses différentes réalités. Je pense à la Communauté de Sant'Egidio qui accomplit tant, de manière visible et aussi invisible, pour la lutte contre le sida, aux Camilliens, et tant d’autres, à toutes les sœurs qui sont au service des malades.

    Je dirais qu'on ne peut pas surmonter ce problème du sida uniquement avec de l’argent, pourtant nécessaire. Si on n'y met pas l'âme, si les Africains n'aident pas [en engageant leur responsabilité personnelle], on ne peut pas résoudre ce fléau par la distribution de préservatifs: au contraire, ils augmentent le problème.

    La solution ne peut se trouver que dans un double engagement: le premier, une humanisation de la sexualité, c'est-à-dire un renouveau spirituel et humain qui apporte avec soi une nouvelle manière de se comporter l'un envers l'autre, et le deuxième, une véritable amitié également et surtout pour les personnes qui souffrent, la disponibilité, même au prix de sacrifices, de renoncements personnels, à être proches de ceux qui souffrent. Tels sont les facteurs qui aident et qui conduisent à des progrès visibles.

    Je dirais donc cette double force de renouveler l'homme intérieurement, de donner une force spirituelle et humaine pour un juste comportement à l'égard de son propre corps et de celui de l'autre, et cette capacité de souffrir avec ceux qui souffrent, de rester présents dans les situations d'épreuve. Il me semble que c'est la juste réponse, et c'est ce que fait l'Eglise, offrant ainsi une contribution très grande et importante. Nous remercions tous ceux qui le font.»

    NB: Au début était le Verbe papal. Dans l’avion qui le conduit au Cameroun, Benoît XVI répond en italien à six questions - connues à l’avance - de journalistes internationaux. Il n’a donc pas été piégé.

    Selon Le Monde et La Croix, une version corrigée du texte a été distribuée, deux jours après les déclarations du Pape, par le Bureau de presse du Saint-Siège.

    Les deux phrases suivantes y ont été modifiées:

    — «Je dirais que l’on ne peut vaincre ce problème du sida uniquement avec des slogans publicitaires»

    — «S’il n’y a pas l’âme, si les Africains ne s’aident pas, on ne peut résoudre ce fléau en distribuant des préservatifs: au contraire, cela risque d’augmenter le problème».

    Cette version «améliorée» n’est apparemment plus disponible.

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