samedi 7 février 2009

Le spectacle du pouvoir

Billet resté à l'état de brouillon pour cause de motion en tête de gondole depuis jeudi ;-)

Où il est question aussi, de la «fin de la taxe professionnelle» annoncée pour 2010... (2ème partie)


Retour sur le Sarko-show de jeudi soir, à la télé.

Dans aucune démocratie au monde, un tel spectacle ne pourrait se produire... En Italie peut-être ? Le Président de la République convoquant trois chaînes de télévision et choisissant lui-même le nom de ses interviewers.

Ainsi va la démocratie française, malade.
Ainsi va notre monarchie élective.

En résumé, le message est simplissime : « La crise est grave, très grave, la plus grave depuis un siècle... Elle pourrait même être terrible... Alors, tremblez !
Mais vous n'avez rien à craindre, puisque je vous protège... Mon boulot n'est pas facile, vous savez... Mais soyez rassurés (!) je m'occupe de tout. »


Voilà, en gros... Ah oui, j'oubliais le clou du spectacle comme d'habitude, la cerise sur la gâteau du Sarko-show de jeudi soir : en 2010, la taxe professionnelle aura disparu ! Rien que ça. Monsieur Je-sais-tout-et-m'occupe-de-tout annonce un coût de 8 milliards d'euros chaque année... En réalité, c'est plus du triple !

Nicolas Sarkozy a compris mieux que personne que le temps médiatique prime désormais sur l'ordre institutionnel.

Le règne de l'homme providentiel en son Palais, donné en spectacle à 15 millions de téléspectateurs à 20 heures 15.

Plus personne ne sait à quoi sert un gouvernement, un parlement même ! Le gouvernement ? Une équipe de collaborateurs fidèles et dévoués. Le parlement ? Une chambre d'enregistrement docile et zêlée. Le nom de deux ministres n'est cité que pour évoquer l'investiture présidentielle pour les élections européennes !

Dans cette communication triomphante où l'affect médiatisé prend le pas sur le débat démocratique, les analyses simplistes triomphent, tout comme les diagnostics bâclés, les formules chocs en guise de solutions, totalement illusoires...

Ainsi, la « fin » de la taxe professionnelle pour 2010...

La taxe professionnelle est désormais la principale ressource des collectivités locales, des villes en particulier. 28 milliards sont collectés chaque année et destinés pour l'essentiel à l'investis-sement, par le financement de nos équipements publics.

Chacun sait, depuis plus de 20 ans, que la base et le mode de calcul de la TP sont absurdes, car ils pénalisent l'investissement des entreprises et conséquemment, l'innovation et l'emploi. La réforme s'impose donc en effet, depuis belle lurette !

Mais annoncer la suppression de la TP est une opération de comm' pure et simple. Où les collectivités locales vont-elles trouver leurs ressources, si la TP est supprimée ?

Il n'existe in fine que deux types d'agents économiques : les entreprises et les ménages — plus un troisième en fait : les pouvoirs publics mais ceux-ci fonctionnent précisément grâce aux ressources fournies par les entreprises et les ménages...

Donc, qui va payer la note, si ce n'est plus les entreprises ? Il suffit de poser la question pour réaliser l'absurdité de ce qui a été annoncé jeudi... La taxe professionnelle sera assurément réformée (et il serait temps), peut-être changera-t-elle de nom mais je doute fort que globalement, il soit opéré un transfert des entreprises vers les ménages.

Tout au plus, et c'est l'enjeu principal de la réforme, il s'agira d'opérer des transferts de base entre les entreprises elles-même pour ne plus pénaliser l'investissement et l'emploi et peut-être pour instaurer une taxe plus écologique — la taxe sur le carbone a été évoquée mais si elle devait voir le jour, sacré défi, c'est bien sur les entreprises qu'elle pèsera !

Alors quand le spectacle sera terminé, peut-être pourra-t-on commencer à faire de la politique et à ouvrir un débat sérieux digne d'une démocratie moderne ?

6 commentaires:

  1. Rien à redire sur la forme que tu dénonces qui traduit une gouvernance non pas démocratique mais manageriale.

    Du coup, la comm est forcément étudiée.

    Tout comme toi, ce n'est pas l'esprit démocratique auquel j'aspire.
    Ceci dit, dans le fond, je pense que Sarkozy agit comme cela par souci d'efficacité. Efficacité en l'occurrence signifierait "redresser la société (entreprise) France" en récession... pour reprendre un terme utilisé par notre premier ministre quand le patron ne maitrisait pas encore bien la comm :-)

    En cela c'est louable que de vouloir ré-équilibrer les comptes, baisser la dette, traverser la crise sans trop de dégât, faire du business avec le monde entier, apporter de l'ordre à l'intérieur de la France et dans le monde, etc..
    Sauf que l'efficacité nécessite des compromis dont il faut bien mesurer ce que cela coûte à notre démocratie.

    Voulons nous faire du business avec du nucléaire? Voulons nous, pour nous prémunir des terroristes potentiels, être contrôlés dans tous nos faits et gestes et être fichés ? Voulons nous pour équilibrer nos comptes faire des coupes franches dans certains secteurs sans considérer les conséquences sociales? Voulons nous que nos chercheurs cherchent uniquement ce qui a des probabilités suffisantes pour devenir des produits potentiels, porteurs de nouvelles parts de marché?

    Ceci dit, pour revenir précisément à la Taxe Professionnelle. Tu dis : "Chacun sait, depuis plus de 20 ans, que la base et le mode de calcul de la TP sont absurdes"

    Pour moi il s'agit là d'une taxe dont LE PRINCIPE est absurde car il empêche la création d'emploi par les artisans notamment. Et lorsqu'on sait que l'Artisanat est le premier employer de France...

    Bien sur que ton raisonnement est juste dans le sens où ce sont, ou les entreprises ou les ménages qui paient.

    Mais vaut mieux payer pour une raison juste, non?

    Aussi, quand bien même la répercution se ferait sur les uns ou les autres, voire les deux, si les critères sont la pollution par exemple ou d'autres critères capables de créer un cercle vertueux, ça serait quand même mieux non?

    Attendons de voir ce qu'il propose ;-)

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  2. @ Lucia :

    Concernant la TP, les masses d'argent à substituer ou à déplacer sont énormes. Tout cela ne pourra pas se faire d'un claquement de doigt... les transferts ne pourront être que progressifs pour ne pas perturber troip violemment les équilibres économiques existants (je parle d'une éventuelle taxe carbone par ex).

    En tout cas, il me semble absolument évident que la TP ne pourra pas avoir disparu en 2010... sauf à simplement changer son nom :-)

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  3. Ben la Taxe Professionnelle disparaitra forcément d'une manière ou d'une autre. L'important est que les collectivités trouvent leurs sources de financement.

    Apparemment la Taxe Carbone ne suffira pas mais d'autres taxes pourraient naitre pour modifier les comportements et créer des cercles vertueux.

    Suffit de se creuser les ciboulos si tant est qu'ils ne soient pas creux! :-)

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  4. @ 1cognita :

    Pourquoi forcément ? Parce que Sarko l'a annoncé ? La TP va surement changer de nom, elle va surement être réformée mais 28 milliards d'euros, on ne trouve pas ça sous les sabots d'un cheval ;-) Mon propos était juste d'indiquer qu'il est peu probable qu'une somme aussi astronomique soit transférée du jour au lendemain, et même à moyen terme, de la poche des entreprises vers celle des ménages.

    Je ne comprends pas bien encore ce qu'est réellement la taxe carbone et ne suis pas encore persuadé de son bienfondé... Sceptique quoi. C'est l'intérêt du débat mais je ne demande qu'à me laisser convaincre.

    On peut bien sûr imaginer toutes les taxes possibles. L'imagination est grande et la complexité fiscale en France montre qu'on sait inventer et innover dans ce domaine ;-)

    La question primordiale reste selon moi : qui paie ? Les entreprises ou les ménages ? Je crains que même en se creusant la tête profond, on ne trouve pas facilement d'autre alternative à ce dilemme !

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  5. Me fait pas bien comprendre mais j'avoue que je peine à expliciter ma pensée. Vais donc re-tenter :-)

    La TP est un impôt contre-productif, c'est le cas de le dire car il décourage la création d'emplois.

    Il s'agit de remplacer cette recette par d'autres qui permettraient de continuer à financer les collectivités.

    Pour cela faut trouver solutions au pluriel parce que je ne pense pas qu'il y ait en effet 1 solution pour remplacer une somme aussi importante.

    Il y a de faire des économies sur le cout des collectivités: il n'est pas question de supprimer un échelon? départemental? Le regroupement aura son lot d'intérêt de de dégâts collatéraux.

    Il y a de nouvelles taxes aux entreprises qui permettraient à celles-ci d'adopter des comportements écologiques, citoyens, responsables de sorte à créer une dynamique vertueuse. Ex la Taxe Carbone. Celle-ci serait demandée aux entreprises plus polluantes en fonction d'une grille qu'il est difficile pour l'instant d'établir. D'un pont de vue technique, pas de problème mais d'un point de vue politique pas évident d'où son retard. Mais pourquoi pas une Taxe pour non comportement citoyen?

    Et pis il y a toutes les solutions à inventer. Pour quoi ne pas imaginer un intéressement des collectivités au bénéfice des entreprises? Pourquoi ne pas se battre au Parlement Européen pour jouer avec une TVA responsable permettant aux ménages d'adopter aussi un comportement plus citoyen ?

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  6. Voir aussi l'excellent Bétiser présidentiel sur le blog de Jean-François Couvrat / Déchiffrages

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