mardi 7 octobre 2008

Connaissez-vous Pénombre ?





énombre décortique l'usage des nombres dans les débats de société. Statistiques, sondages, chiffres 'officiels'... rien n'échappe aux fourches caudines de Pénombre et à la sagacité de ses rédacteurs. Et c'est un vrai plaisir de découvrir le dernier numéro de Pénombre, chaque trimestre, au fond de sa boîte à lettres.

« Fondée en juin 1993, Pénombre regroupe à ce jour 450 adhérents de compétences professionnelles très diverses ayant en commun le souci d’améliorer le débat démocratique par une utilisation raisonnée du nombre. »

Pour vous faire une idée, les archives de Pénombre sont consultables gratuitement sur le Web, ici. On y retrouve tous les anciens numéros jusqu'à l'avant-dernier, un classement des articles par thème facilite le feuilletage ici.

En plus de sa lettre d'information trimestrielle, Pénombre édite également des lettres 'grises' sur des thématiques particulières et organise assez régulièrement des soirées de rencontre et de débat sur un grand thème d'actualité.

Pénombre s'apprêtait à fêter son 50ème numéro. Mais Pénombre n'aime pas les chiffres ronds, alors je viens de recevoir un numéro carré pour marquer l'évènement : le numéro 49 (7 au carré) est massicoté... en carré. Un collector !

Je fais une entorse à la règle fixée pour ce blog, en reproduisant ci-dessous l'éditorial de l'avant-dernier numéro -- il sera en ligne bientôt sur le site de Pénombre et si cet extrait vous convainc, n'hésitez pas à vous abonner, ici.



Pénombre s'intéresse aux chiffres, moins aux mots, en principe... et pourtant. Ne serait-ce pas plutôt les mots qui posent problème ? Les mots mis sur les chiffres, s'entend, les appellations qu'on leur donne... Quelques exemples :

Les célèbres « prélèvements obligatoires ». Une fois le terme posé, le chiffre qui vient dessus a-t-il encore une importance ? C'est forcément « trop ». N'importe quel chien de Pavlov sait ça. Alors, 39,7% ou 63,2% ou un autre chiffre, ça n'a aucune importance. C'est « trop », évidemment trop.

Les « chiffres de la délinquance » ? Trop, forcément « en hausse ». Qu'importe le détail du chiffre ?

Le « nombre de fonctionnaires » : bien trop ! ... Mais au fait, combien sont-ils ? 3 millions ? 4 millions ? 5 millions ? Bien trop, vous dis-je !

Les « dépenses de santé » (en croissance inquiétante, bien entendu...)

Alors, si on changeait les mots, au lieu de raffiner les chiffres ?


On dirait « indice de solidarité » au lieu de « taux de prélèvements obligatoires » : après tout, c'est bien de cela qu'il s'agit (le volume des services collectifs et des redistributions sociales).

On dirait « travail de la police » au lieu de « chiffres de la délinquance » (ce serait en toute rigueur plus exact).

« Nombre de professeurs, d'infirmières, de policiers... »
plutôt que « nombre de fonctionnaires » ?

« Chiffre d'affaire du secteur santé »
plutôt que « dépenses de santé » ?

Ce que l'on choisit de mesurer, et le nom qu'on lui donne, détermineraient-ils la conclusion, avant même toute mesure ?

Le chiffre, pris au mot, serait-il pris au piège ?

Le même mot anglais 'figure' traduit nos mots « figure », « chiffre » et « statistiques » : les Anglais ont bien vu que dans le débat public, le chiffre est utilisé effectivement pour figurer, pas pour compter. Et si les intitulés des chiffres sont bien choisis, le masque des mots suffit, la « figure » elle-même devient inutile.

Éditorial du numéro 48 de Pénombre - avril 2008


6 commentaires:

  1. La pénombre baignée de lueur rasante et d'ombres portées, nous fait souvent imaginer des histoires insensées. Et le promeneur de la pénombre oscillant dans doute et la furtivité cherche désespérément le trésor fabuleux, que serait pour lui, un éclat de lumière, une étincelle de vérité...

    Dans la pénombre qui est la notre, la même couleur d'un objet, ne dépend que de son angle d'observation. A partir du moment où on comprend cela, on devient un vrai démocrate...

    Philippe,

    Non, non je n'ai pas fumé la moquette...

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  2. Je n'y avais pas pensé en rédigeant mon billet mais dans autre genre (et sans avoir fumé la moquette :) je recommande vivement la lecture de L'Éloge de l'ombre, de Junichirô Tanisaki, un des rares livres que j'ai lu d'un seul trait, en une seule nuit. C'est une recommandation d'architecte :)

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  3. ... en général, comme lecteur, c'est à ce moment-là que j'apprécie le secours de l'hypertexte :

    http://www.amazon.fr/Leloge-lombre-050996-J-Tanizaki/dp/2716903069

    http://ecx.images-amazon.com/images/I/413Q9WAZFKL._SS500_.jpg

    :)

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  4. @ philippe qui me semble être un démocrate sincère à la recherche d'une 'lumière' (ne pas prendre les vessies pour des lanternes :) une citation du numéro 48 de Pénombre :

    « Le lieu le plus sombre est toujours sous la lampe »

    Proverbe chinois.

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  5. merci .. merci .. merci pour cette découverte lumineuse.

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  6. Allez! sur le même thème, un bon dernier jeux de mots, pour la route!

    Au pays des aveugles, le manchot est roi!

    Mais quoi? Qu'est ce qu'il y a? C'est pas ça?

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