jeudi 12 novembre 2009

Choisissez le futur Président du Conseil européen

Les 27 chefs d'État et de gouvernement de l'Union européenne désigneront, pour la première fois, le 19 novembre prochain le 1er Président "stable" du Conseil européen – voir un précédent billet sur l'alerte du Mouvement européen à ce sujet –.

Devant l'intérêt suscité par cette nomination, la Fondation Robert Schuman nous donne la possibilité de voter entre les personnalités dont les noms sont avancés pour ce poste, persuadée que notre opinion comptera...

Reste à savoir si la nouvelle Présidence "stable" du Conseil européen – 2 ans ½ selon le Traité de Lisbonne – ne risque pas de faire de l'ombre à la diversité politique, culturelle & linguistique au sein des instances de l'Union... L'avenir nous le dira.

Dernière minute :
Simone Veil déclare soutenir Vaira Vika-Freiberga
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4 commentaires:

  1. Je lis beaucoup d'hypothèses et de commentaires sur la nomination prochaine du futur président du Conseil européen et peu me semblent correspondre aux besoins actuels de l'Europe.

    À la tête de la réunion des vingt-sept chefs d'État et de gouvernement, il nous faut une personnalité qui soit, à la fois, un symbole de ce que l'Europe a de meilleur et qui soit capable d'aider les responsables à mieux décider. L'Europe a besoin d'une volonté politique plus affirmée. Elle doit aussi s'incarner.

    Parmi les noms cités, Mme Vaira Vike-Freiberga, qui, pendant deux mandats, a présidé avec éclat aux destinées de la Lettonie, est une femme remarquable qui cumule toutes les capacités requises (cf. http://unepresidentepourleurope.eu).

    C'est une femme dont la hauteur de vues et les qualités morales et intellectuelles sont exceptionnelles. Polyglotte, universitaire réputée, pétrie de culture européenne, ouverte et accessible, elle a eu le courage d'affronter toutes les questions posées par le douloureux passé de son pays et de l'Europe pour en faire une force tournée vers l'avenir.

    Le futur président du Conseil européen devra faire preuve d'un grand savoir-faire, préparer les travaux des chefs d'État, les animer et les conduire en veillant à ce que chacun puisse être entendu mais que tous puissent décider vite et bien. Mais il devra aussi être proche des citoyens, notamment les plus jeunes, et présenter une image attrayante, sympathique et respectable. Il en va du rôle de l'Union européenne et de sa place sur la scène internationale. Qui mieux qu'une femme d'expérience comme elle saura montrer le doigté nécessaire pour respecter les État membres, mais aussi les amener à s'accorder ? Ayant présidé le Parlement européen, je sais combien il est difficile de forger les consensus, de tenir compte d'avis souvent inspirés par l'histoire personnelle des grands acteurs de l'Europe, de concilier des positions apparemment inconciliables. Je connais aussi le poids des symboles.

    Ses recherches sur le langage et ses écrits sur les traditions orales en font une scientifique reconnue. Son histoire personnelle, qui l'a conduite à vivre les horreurs du second conflit mondial, traversant l'Europe jusqu'à la Méditerranée, puis trouvant refuge au Canada avant de rentrer dans son pays à la chute du mur de Berlin, la qualifie tout spécialement pour incarner une réconciliation des peuples d'Europe. C'est une intellectuelle engagée, qui a l'expérience des affaires d'État, mais n'oublie jamais de prendre le recul nécessaire pour agir et parler au niveau qui convient.

    L'Europe a besoin de souffle parce qu'elle reste la garantie de ne pas retomber dans les affres du passé et l'espoir de compter dans un monde qui se transforme. Elle doit avoir l'audace de choix qui ne soient pas seulement diplomatiques, mais qui représentent des gestes politiques forts. La nomination de Vaira Vike-Freiberga serait de ceux-là. Je souhaite que les chefs d'État et de gouvernement aient ce courage et cette ambition.

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  2. Publié le 12/11/2009 - N°1938 Le Point

    L’Union européenne va désigner pour la première fois son président stable. C’est un événement historique, et le plus extraordinaire est son absence de préparation ! La proposition de l’élire remonte déjà à six ans. Elle figure dans le projet de traité constitutionnel à l’article 21 : « Le président du Conseil européen est élu par le Conseil à la majorité qualifiée [ce qui fait disparaître le droit de veto] pour une durée de deux ans et demi, renouvelable une fois. » Le traité de Lisbonne, sur le point d’être ratifié, reproduit cet article sans en changer un mot. La règle est fixée, mais il reste à l’appliquer. L’expérience des Etats-Unis et de la France montre que de nombreuses questions se posent : doit-on faire acte de candidature, et dans quel délai ? Les candidats ont-ils des conditions à remplir ? Doivent-ils avoir siégé dans les institutions européennes ? Doivent-ils appartenir à un Etat membre qui applique toutes les politiques de l’Union ? Ces candidatures doivent-elles être accompagnées d’un élément de programme : gestion de la crise économique, fonctionnement des institutions, attitude vis-à-vis des demandes d’élargissement ? Le Conseil auditionnera-t-il les candidats avant de faire son choix ? Fera-t-il appel aux sondages de l’Eurobaromètre pour tester les réactions des citoyens sur les noms cités, et s’approcher ainsi d’une démarche démocratique, vers laquelle il faudra évoluer ? Tout cela aurait dû être étudié et prévu au cours des six dernières années, en attente de la ratification, soit par une commission du Conseil, soit par un comité spécial créé à cette fin, et présidé par un homme d’expérience comme, par exemple, le président Ciampi ou le président von Weizsäcker, qui auraient fait des propositions au Conseil. Cette suggestion, qui a été présentée auprès des présidences tournantes successives, est restée sans réponse. La désignation du premier président du Conseil européen va se faire dans l’improvisation ! Souhaitons que le bon sens et l’esprit européen inspirent les décideurs ! Une modeste suggestion : qu’au moment de choisir ils ferment les yeux et qu’ils imaginent leur candidat, assis en face de Barack Obama ou du président Hu Jintao, en train de défendre, avec force et autorité, les positions européennes !

    (...)

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  3. (...)

    L’idée de lancer un grand emprunt, qui a été présentée au président Sarkozy, semble-t-il, sans étude préalable, doit être traitée avec beaucoup de prudence. L’illusion qui se répand dans l’opinion consiste à croire qu’il s’agit de recueillir des ressources supplémentaires qui permettront de financer un nouveau train de dépenses publiques. Rien ne serait plus néfaste. Un emprunt, surtout s’il est vu avec méfiance, ne mobilise pas une épargne nouvelle. Il se substitue aux émissions de bons et de titres que le Trésor effectue de manière continue pour financer le déficit massif des finances publiques. Le grand problème de la France dans les années à venir sera l’excès de ses dépenses publiques, qui génère un déficit élevé, et un endettement record. Le gouvernement conduit des actions courageuses pour le réduire. Or la France ne retrouvera un taux de croissance suffisant pour diminuer le chômage que lorsqu’elle aura rétabli un meilleur équilibre de ses finances publiques, laissant ainsi une part suffisante de l’épargne disponible pour financer le développement de ses entreprises, sans hausse excessive des taux d’intérêt. Un grand emprunt peut être utile s’il améliore le financement de la dette, en procurant des ressources plus longues ou moins chères, ou encore s’il se substitue aux besoins d’opérateurs qui n’ont pas d’accès direct au marché. Mais il ne constitue en rien une cagnotte permettant d’étancher la soif de dépenses budgétaires nouvelles. Dans ce cas, il ne serait que l’alibi d’une augmentation supplémentaire de la dépense publique. La fin de la crise bancaire dans sa phase la plus aiguë, que je m’étais permis d’annoncer ici pour l’été 2009, laisse intacte, et même aggravée par les dépenses nouvelles qui ont dû être engagées, la difficulté de réussir la sortie de la crise, en se tenant à égale distance des deux solutions néfastes que seraient la hausse des prix et l’augmentation des impôts. Faisons confiance aux pilotes de notre économie pour ne pas y ajouter les inconvénients d’un emprunt spectaculaire, qui masquerait une augmentation de nos dépenses publiques.

    par Valéry Giscard d'Estaing.

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  4. Certes, l’ancienne présidente lettone n’a pas été élue présidente du Conseil européen des chefs d’État et de gouvernement. Mais sa campagne, auprès d’une société civile qui s’est montrée très réceptive dans l’ensemble des États membres, a au moins permis de placer en haut de l’agenda communautaire la question de l’égalité des genres, alors que cette question était jusque-là absente des débats. À tel point que les hommes qui nous gouvernent se sont sentis obligés de nommer une femme comme ministre européen des affaires étrangères. Et, bonne nouvelle, elle est aussi incompétente que n’importe quel homme ;-)… A défaut de la présidence du Conseil européen, Vaira Vike Freiberga a au moins gagné ce combat.

    Les trois derniers États membres à ne pas avoir désigné officiellement leur commissaire (la République tchèque, le Danemark et Malte) subissent actuellement une forte pression pour envoyer à Bruxelles une femme. Pour l’instant, on ne compte, en effet, que sept femmes (contre huit dans la Commission sortante), alors que dix-sept hommes ont gagné leur ticket pour Bruxelles. Si la seule femme du Conseil européen, la chancelière allemande Angela Merkel, a désigné un homme, plusieurs de ses collègues masculins ont opté pour des femmes : c’est le cas de la Bulgarie (Roumania Jeleva), de Chypre (Androoulla Vassiliou), de la Grèce (Maria Damanaki), de l’Irlande (Maire Geoghegan-Quinn), du Luxembourg (Viviane Reding), de la Grande-Bretagne (Catherine Asthon) et de la Suède (Cecilia Malmström).

    Politiquement, la future Commission est, évidemment, très à droite : pour l’instant, on compte 11 PPE, 7 libéraux, 5 socialistes et un commissaire sans étiquette. Si les socialistes gagnent les élections en République tchèque, ils auront un représentant de plus. C’est donc une Europe « bleu horizon » qui dominera le Conseil européen, le Conseil des ministres, la Commission et le Parlement européen. Dès lors, il ne faudra pas s’étonner que les politiques européennes soient de droite.

    Jean Quatremer
    le 20/11/2009

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