mardi 25 janvier 2011

Mais où est donc passée la taxe poids lourds pour l'Alsace ?

par Yann Wehrling, Michel Lorentz et Frédéric Le Jehan

Elle était prévue fin 2010 ou début 2011. Elle devait tester, en Alsace, avant généralisation à la France entière, une éco-redevance pour les poids lourds de plus de 12 tonnes. Elle devait s'appliquer dans notre région à 190 km d'autoroutes ou de routes nationales et à 54 km de routes départementales.

Mais il y a un an, le gouvernement avait déjà en partie abandonné le principe d'une expérimentation distincte ; pour son application la redevance alsacienne sera rattachée au Partenariat Public Privé (PPP) prévu pour la création d'une éco-redevance nationale. En clair, l'expérimentation dépendra techniquement, juridiquement, comme dans son équilibre financier, des choix d'un opérateur dont la priorité sera la mission nationale.

Dépourvue d'autonomie dans sa mise en œuvre, cette anticipation régionale, se retrouve dépendante des «difficultés techniques» rencontrées par le projet de PPP national, qui servent de prétexte au report de l'ensemble.

Cette expérimentation-croupion limitée à une année (voire moins) avant la création d'une redevance nationale était déjà un premier recul car le débat sur la question, lancée par l'installation côté allemand du système de péage dit LKW Maut, a surtout révélé les hésitations, tergiversations et atermoiements des responsables alsaciens.

Le discours, d'abord ferme, s'est érodé au fur et à mesure que les transporteurs locaux faisaient valoir leurs intérêts. Le droit européen ne permet pas en effet de taxer exclusivement les poids lourds non alsaciens, ce qui se comprend aisément dans un espace de libre circulation des marchandises et de traitement équitable des entreprises.

Au 1er janvier 2005, le nouveau système de péage allemand a commencé à s'appliquer : il s'agit d'une redevance qui se calcule en fonction du nombre de kilomètres parcourus sur le réseau autoroutier allemand. Elle génère, fort naturellement, un effet report du trafic de l'autre côté du Rhin, encore accentué par l'absence de péage même classique sur l'axe nord-sud alsacien. Et cela fait déjà six ans qu'aucune réponse concrète n'a été mise en œuvre entre Vosges et Rhin.

Les expérimentations locales vues d'un mauvais œil.

Au fond, sur ce sujet inscrit dans l'esprit du Grenelle de l'environnement, comme d'ailleurs sur celui de la taxe carbone, le recul est patent.

Aux bonnes et louables intentions gouvernementales des débuts a succédé le temps des frictions et des doutes, préalable à celui de l'enlisement. D'une part, l'esprit jacobin qui imprègne une bonne part de nos grandes administrations nationales a toujours vu d'un mauvais œil les expérimentations locales, a fortiori lorsqu'elles concernent une région de « la France de l'extérieur». D'autre part, les entreprises de la filière concernée se battent pour protéger leurs intérêts, ce qui est bien naturel et à quoi il faut répondre par des mesures sectorielles de prise en compte de leurs difficultés économiques plutôt que de renoncer à une mesure d'intérêt général.

Au final, les autres usagers des autoroutes et routes d'Alsace ou les Alsaciens eux-mêmes payent le prix de ce recul à travers un encombrement et une pollution accrus sur ces axes. Une fois de plus, le volontarisme politique semble faire défaut pour défendre les intérêts de notre région.

Yann Wehrling, porte-parole du Mouvement Démocrate et membre du Shadow cabinet chargé de l'écologie et du développement durable.
Michel Lorentz, maire de Roeschwoog (MoDem)
Frédéric Le Jehan, ancien conseiller municipal de Strasbourg (MoDem)

Tribune parue dans les Dernières Nouvelles d'Alsace,
mardi le 25 Janvier 2011

2 commentaires:

  1. L'écoredevance est reportée jusqu'à la fin 2012 pour des raisons techniques.

    Après l'abandon de la taxe carbone, le report de l'écoredevance. La nouvelle taxe qui devait être mise en place en 2011 ne sera pas effective avant la fin de 2012 au grand dam des écologistes. «Pour nous, le principe n'est absolument pas mis en cause», a défendu dès dimanche le ministère de l'Écologie. D'ailleurs les équipes de Jean-Louis Borloo, soulignent que ce report ne doit pas être considéré comme un revirement politique mais plutôt comme un délai de grâce accordé aux groupements candidats pour peaufiner les détails techniques de l'opération.

    Ces consortiums, dont Bouygues ou la Sanef, ont besoin de peu plus de temps pour résoudre les contraintes de ce système sophistiqué de péage inédit en France. L'écoredevance considérée comme l'une des pièces maîtresses du Grenelle de l'environnement, est censée limiter le recours aux camions de plus de 3,5 tonnes sur quelque 15 000 kilomètres de routes nationales (ou départementales) du réseau français. Mais sa mise en œuvre est complexe. Le calcul des trajets, donc des prix, sera réalisé grâce à des «GPS» embarqués à bord des véhicules et des portiques.

    Un milliard d'euros

    En théorie, 600 000 camions français et 200 000 étrangers acquitteront une taxe comprise entre 2,50 et 20 centimes par kilomètre parcouru. Ils devraient apporter annuellement environ un milliard destiné principalement à l'Agence de financement des infrastructures de transport. Paradoxalement, les routiers n'ont pas été surpris par ce report. «Il était impossible de mettre en œuvre plus tôt un système de péage aussi compliqué. L'État est prisonnier du système mis en place», explique Jean-Paul Deneuville délégué général de la Fédération nationale des transports routiers (FNTR).

    Charles Gautier
    Le Figaro, 20/04/2010

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  2. Introduite il y a dix ans, la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP) reste contestée, même si tous les acteurs peuvent y trouver du positif.

    La redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP) a dix ans. Une taxe toujours contestée mais utile pour le réseau ferroviaire. Même si le transfert de la route au rail qu'elle devait engendrer n'a toutefois pas eu lieu.

    Les entreprises de transport restent scandalisées par la taxe pour utiliser les routes suisses et son montant. Mais elles s'y sont résignées depuis que le Tribunal fédéral a rejeté en avril dernier un recours de l'Association suisse des transports routiers (ASTAG) contre la décision du Conseil fédéral de l'augmenter de 10%.

    La hausse de la redevance a été introduite au printemps 2010. Depuis cette date, les 40 tonnes paient 325 francs pour un trajet Bâle - Chiasso.

    Lire la suite dans la Tribune de Genève

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